Disponible sur Netflix depuis déjà quelques mois, William Friedkin replonge dans ses premières amours : le documentaire. Et tant qu’à faire, autant surfer son son deuxième grand amour, le film qui a fait son succès auprès du grand public : l’Exorciste
Son documentaire, intitulé The Devil and Father Amorth retrace donc le « véritable » exorcisme d’une femme, pratiqué par l’Exorciste en Chef du Vatican, le Père Gabriel Amorth.
Entre found footage et documentaire sensationnaliste
Le ton est donné dès les premières minutes du documentaire, qui ressemble plus à une bande annonce qu’une réelle introduction. Musique mélo-dramatico-angoissante et micro-témoignage de l’écrivain Jeffrey Burton Russell, qui nous met en garde : il est dangereux de s’intéresser au démon, et, je cite « les gens devraient rester à l’écart de ce sujet autant que possible ».
Nous y voilà, le magicien Friedkin nous sort un lapin de son chapeau, l’hameçon est lancé et les plus faibles vont y mordre. Un peu plus et on penserait voir un épisode de Crimes au Vatican de Morandini.
Et l’ami Willi a plus d’un tour dans son sac, il nous le prouve en nous livrant le contexte de son documentaire : le Père Amorth l’autorise à filmer le neuvième exorcisme de la bonne dame (ben oui les huit autres n’ont pas fonctionné, sinon ça ne serait pas drôle), sous réserve que l’exorcisme soit uniquement filmé par une petite caméra tenue à la main, sans équipe de tournage. Ben voyons. On tient notre Blair Witch 4 : William se fait le Vatican.
A noter que William Friedkin est lui-même souvent filmé, caméra à la main, par ses propres équipes. A en croire qu’il s’agit plus d’un documentaire sur lui-même que sur le Père Amorth, petit démon qu’il est.
Le Démon (à gauche ?) et le Père Amorth.
Une petite promo de l’Exorciste, comme ça, en passant
Et c’est là que William Friedkin rime véritablement avec Marketing. Le petit malin arrive quand même à nous caser 5 bonnes minutes de reportage sur son propre film (et plus gros succès commercial) l’Exorciste.
Nous avons alors droit à une visite guidée de la maison de Georgetown qui a servi de décor extérieur au film, ainsi que les fameuses marches jouxtant la maison au pied desquelles le gentil Père Karras du film rend son dernier souffle (sympa le parallèle pour le Père Amorth, qui lui est encore bien vivant au moment ou le documentaire à été tourné).
Un making-off du film l’Exorciste vient donc se glisser dans ce qui à la base devait être un documentaire sur le sort d’une pauvre femme possédée par un démon.
Science versus croyance
Alors pour faire les choses bien, il s’agit d’un documentaire tout de même, William Friedkin vient faire l’opposition entre science et croyance, en interrogeant des médecins et autres neurologues et tentant alors d’obtenir une réponse médicale à l’état de cette jeune femme dont nous venons de voir le neuvième exorcisme, filmé caméra au poing. L’idée est séduisante, mais attendez la suite.
On est donc en plein documentaire, William Friedkin se contente simplement de filmer les faits, en toute objectivité, et à nous spectateur, d’en tirer les conclusions qui nous paraissent juste. Mais ça n’est pas comme ça que ça fonctionne avec Friedkin. Le parti est pris dès le début, et le spectateur se fait balader et gentiment prendre par la main vers la conclusion la plus évidente. Friedkin a même le culot de demander à l’un des médecins s’il est croyant et pratiquant. Au diable l’objectivité documentaire.
Ainsi, le Trouble Dissociatif Extatique décrit par les médecins est littéralement traduit par possession démoniaque par Friedkin. Un raccourci très vite pris et somme toute franchement insolent, que de venir faire fusionner exorcisme et science en quelques minutes de reportage.
Un plot twist démoniaque
Comme si cela ne suffisait pas, la fin du documentaire nous révèle que le neuvième exorcisme pratiqué sur la femme par le Père Amorth n’a pas fonctionné, et nous montre des images du revirement de situation, avec bien évidemment, des réactions de la possédée exacerbées et bien plus violentes. De vrais showmen ces démons.
Cerise sur le gâteau, ou superbe foutage de gueule, à vous de choisir, la fin du documentaire nous explique que William Friedkin a été invité dans une église (ben voyons) par la femme possédée, mais que, mince c’est pas de chance, William Friedkin n’a pas emmené sa caméra. La fin nous sera donc contée, façon histoire d’épouvante autour du feu et la conclusion sera subtilement filmée au bas des fameuses marches de la fin de l’Exorciste. Félicitations si vous avez tenu jusqu’à la fin, vous venez de vous faire Friedkiniser.
Note : une tronçonneuse, parce que c’est un vrai livre blanc pour étudiants en marketing
A VOIR SI :
- Vous aimez Crimes sur NRJ12
- Vous adorez l’émission Alien Theory
- Vous avez vu tous les Paranormal Activity, y compris le 150ème et en redemandez
A NE PAS VOIR SI :
- Vous avez des choses plus importantes à faire, du type nettoyer les vitres ou conduire grand-mère au bridge
- Vous souhaitez conserver cette part d’admiration que vous avez pour le travail de Friedkin
- Vous ne voulez pas vous faire spoiler la fin du film l’Exorciste